• Frédérique Germanaud : Intérieur. Nuit. lecture par Clara Régy

    C’est un film. Un court métrage collé au millimètre du temps.
    Avec un « je » qui pense : « C’est toute une histoire/ Qui ne s’écrira pas »

    Le texte - une suite en dix pages assez frêles-s’écrit un peu pourtant dans :
    « L’espace serré du carnet cousu » ou comment dire l’enfermement, un champ d’action réduit à la taille du premier objet, puis aussi à celle du crayon qui « Accroche/ Agrippé dans l’effondrement des heures » refuse de se prêter au jeu, au « je » ?
    « J’attends qu’un poème sorte de la pointe du Bic »
    Et l’auteur immobile à sa table de cuisine attend, réduit(e) à une extrême observation du décor intérieur « nappe à pois bleus sur fond blanc » « miettes » et le lecteur immobile aussi attend ...

    Nous avons froid : « Basse température/ J’enfile un pull sur l’autre/Mon cœur dans la laine » nous voulons poursuivre la rencontre, nous laisser emporter par la magie du texte qui convoque ( l’extérieur ?) chevaux, hérissons, nous voulons ouvrir nos oreilles à une seconde voix ( en italique dans le texte) « Pendant l’accouplement le mâle mord souvent la femelle » nous voulons savoir que : « Les animaux rêvent aussi » !

    Dans cet « espace » clos c’est un bataillon de fantômes -peut-on dire qu’ils fassent peur- qui s’invite dans une cuisine : « De la pointe du crayon/Je remue un peu les verbes » s’agirait-il alors d’une recette ?

    À l’aube, l’auteur avoue « Je mens » , éclaire cet opus « J’ai raclé la nuit jusqu’à ces mots mal écrits », « Seul mon crayon bouge encore » bat encore ? Et la casquette du père se remplit...

    Ainsi fantasmagorie et quotidien ont chevauché ces pages donnant à ce recueil un rythme bien singulier, la difficulté d’écrire glissée dans un costume aux coutures fragiles. Un très beau texte.

     

    Clara Régy 
    lire sur terre à ciel


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